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Interview avec monsieur Doue Vincent à Gueyo.
Monsieur Kpatié Doué Vincent est pisciculteur à Guéyo. Il est également
pisciculteur sympathisant de l’APDRA-CI et le Président de l’Association
des pisciculteurs de Guéyo. Il s’exprime ici au nom des pisciculteurs
du foyer de Tagbayo sur l’absence prolongée e leur aménagiste, des préjudices
que cela leur causent et de leur intention de former un nouvel aménagiste.
Un cas qui peut interpeller tout le monde. Ecoutons-le pour comprendre
pourquoi.
APDRA : Pourquoi voulez-vous proposer un autre candidat aménagiste
à une prochaine formation des aménagistes ?
Doué Vincent : Nous souhaitons former un deuxième aménagiste
ici parce que l’absence de Djénéba de la zone nous pénalise énormément.
Actuellement il y a de nouvelles demandes de piquetage qui ne peuvent
être réalisés. Les pisciculteurs ne savent que faire.
APDRA : Pourquoi vous n’allez pas chercher Jean-Claude (le deuxième
aménagiste de la zone) à Kossoyo pour venir faire vos piquetages ? Pourquoi
vouloir forcement former un nouvel aménagiste ?
Doué Vincent : Jean-Claude a été formé après Djénéba, et donc
Djénéba était déjà sur le terrain avant même que Jean-Claude ne soit désigné
pour aller à la formation à Daloa. Cela signifie que les besoins étaient
tel que un seul aménagiste ne suffisait plus pour couvrir toute la zone
de Guéyo. On a formé Jean-Claude pour compléter Djénéba et non pour la
remplacer. Et donc avec la défection d’un des aménagistes, en l’occurrence
Djénéba, on retombe dans la situation qu’on a voulu éviter en formant
2 aménagistes. Voilà pourquoi nous voulons actuellement former un autre
aménagiste.
APDRA : Et si le deuxième aménagiste que voulez proposer à la prochaine
formation est de Guéyo-ville ou de Kossoyo, est-ce que cela vous arrangerait
?
Doué Vincent : Ce nouvel aménagiste sera forcement de Tagbayo.
Nous trouverons ici des personnes qui vont répondre aux critères de sélection.
APDRA : Pourquoi voulez-vous qu’il soit à tout prix de Tagbayo et
non d’ailleurs ?
Doué Vincent : D’abord parce que, le nouvel aménagiste vient
en remplacement de Djénéba qui était à Tagbayo. Ensuite, parce que la
grande partie des demandes de piquetage sont enregistrées à Tagbayo et
ses environs ; et les pisciculteurs n’ont pas les moyens d’aller chercher
un aménagiste à Kossoyo à une vingtaine de km d’ici. La prise en charge
dans un tel cas serait très coûteuse pour le pisciculteur ou le candidat
pisciculteur. D’ailleurs, nous avons déjà vécu cette situation quand au
début, on faisait déplacer l’aménagiste Yaya Forgo de sa zone de Gnatroa
jusqu’à chez nous. On connaît le prix à payer dans un tel cas et on ne
veut plus retomber dans ce système.
APDRA : Est-ce à dire que pour vous, Djénéba est définitivement perdue
pour la pisciculture, puisque vous voulez à tout prix la remplacer ?
Doué Vincent : Répondez vous-même à la question !
APDRA : …
Doué Vincent : Cela fait déjà combien de fois que tu viens travailler
avec nous ici sans qu’elle ne soit encore de retour ? … Aux derniers échos
que nous avons reçus, elle serait aide-infirmière à Sinfra. Si cela est
vrai, ça veut dire qu’elle est en train de trouver sa reconversion.
APDRA : Et si elle revenait à Tagbayo alors que vous avez déjà proposé
un nouveau candidat aménagiste en remplacement, qu’est-ce qu’il se passera
?
Doué Vincent : Ah bon ? Parce que vous voulez qu’on attende de
savoir d’abord qu’elle reviendra ou pas avant de former un autre aménagiste
? Et si on attend qu’elle ne revient pas ?… De toutes les façons si elle
revient, ça nous fera tout simplement 3 aménagistes dans notre zone et
aucun d’eux ne manquera de sollicitations. Trois aménagistes dans notre
zone ne nous déplairaient pas non plus.
APDRA : Avez-vous mené des démarches pour chercher à savoir exactement
ou se trouve Djénéba depuis son départ de Tagbayo ?
Doué Vincent : Nous avions appris au début de son absence qu’elle
était à Daloa au service de l’APDRA-CI pour des travaux dans certaines
zones comme Issia. Et c’est de là qu’elle n’est plus retournée ici à Tagbayo.
Donc, depuis octobre 99, ça fait maintenant 6 mois, nous n’avons aucune
nouvelle d’elle. Elle n’a jamais écrit à qui que ce soit pour dire où
elle est et qu’est-ce qu’elle y fait. Il y a même des pisciculteurs sympathisants
qui ont eu à lui confier à l’époque leurs cotisations et des cartes de
membre qu’elle devait faire signer à Daloa. Ces pisciculteurs-là ne sont
pas encore rentrer en possession de leurs cartes parce qu’ils n’ont plus
revu Djénéba depuis.
APDRA : Mais est-ce que vous avez cherché à la joindre pour comprendre
les intentions de son absence prolongée ?
Doué Vincent : On ne peut rentrer en contact qu’avec quelqu’un
qui vous a laissé ses coordonnées. Nous n’avons aucune adresse de Djénéba
là où elle se trouve. Or, elle a toutes nos coordonnées d’ici, mais elle
n’a jamais contacté qui que ce soit ou envoyé de message à personne ne
serait-ce que pour dire qu’elle se porte bien là où elle est. Alors ?
!…
APDRA : Nous sommes maintenant au terme de notre entretien ; Avez-vous
un appel à lancer à l’endroit de Djénéba ?
Doué Vincent : Je ne sais même pas avec exactitude où elle est
; je ne peux pas lui lancer un appel sans savoir si elle l’entendra ou
pas. Par contre, J’insiste sur le fait que nous n’avons pas d’aménagiste
depuis plus de 6 mois, et que nous en avons vivement besoin.
Propos recueillis par Mama Coulibaly.
Gueyo : rencontre avec Dotana et Ardjouma Coulibaly :
Après une longue souffrance pour obtenir des prédateurs (hémichromis),
les pisciculteurs de Guéyo s’engagent désormais à produire des poissons
de grande taille. Ainsi un pisciculteur du foyer de Tagbayo a effectué
sa toute première vidange en février dernier dans son barrage ouvert dont
la surface est estimée à 24 ares. Il dit avoir fait son empoissonnement
avec 372 TN sexés et seulement 2 hétérotis (par manque d’alevins d’hétéro
à l’époque). A la vidange, il a retrouvé ses 2 hétéro, mais n’a retrouvé
que 222 TN sur les 372 de départ. En plus, il a trouvé dans son barrage
des poissons qu’il n’a pas mis à l’empoissonnement, à savoir 3 silures,
1 parrachana (poutou), et 4 zillis. Nous avons recueilli ses sentiments
sur ses premiers résultats. Ecoutons-le.
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APDRA : Bonjour, Monsieur Coulibaly. Présentez-vous.
Coulibaly Dotana et fils : Bonjour Monsieur Mama. Je m’appelle
Coulibaly Ardjouma et mon père ici présent s’appelle Coulibaly Dotana.
Nous sommes planteurs à Guéyo, précisément à Tagbayo où mon père et moi
vivons ici à deux dans notre campement avec notre famille. La pisciculture
nous intéressait depuis longtemps, mais c’est à partir de 1995 que nous
avons commencé à la pratiquer en creusant nous-mêmes des trous, avec notre
expérience personnelle ; Jusqu’à ce que l’APDRA-CI vienne nous mettre
sur les bonnes techniques. Et nous avons trouvé que les techniques de
l’APDRA-CI sont bien.
APDRA : En quelle année avez-vous fait votre premier barrage avec
l’APDRA-CI ?
Dotana et fils : Le piquetage a été fait en 1998 par Djénéba
(l’aménagiste de la zone), mais c’est en 99 que nous avons fini de construire
parce que nous avions eu quelques problèmes de financement. C’est qu'au
début, on avait voulu le construire nous-mêmes mon père et moi. Mais étant
seulement deux, les travaux traînaient et Djénéba nous a dit que c’est
par les tâcherons que ce sera le plus facile. Donc elle-même est allée
chercher des tâcherons à Gagnoa et nous avons discuté du prix, et nous
sommes tombés d’accord sur 250 000 FCFA…
APDRA : Donc c’est en 99 que votre barrage était prêt à être empoissonné
? -Dotana et fils: Oui. - APDRA : Et vous avez déjà fait une vidange ?
Dotana et fils : Oui. Notre première vidange. C’était en février
passé, après un cycle de 6 mois. Nous avons récolté au total 93,5 kg de
poissons, c’est-à-dire 77 kg de TN, deux hétérotis de 6 kg chacun, plus
1 kg de zilli, 02,8 kg de silure et 800 grammes de poutou. C’était bien.
APDRA : Et qu’est-ce que vous avez fait de ces kg de poissons ?
Dotana et fils : Nous avons vendu en tout 69 kg de poissons à
500 francs le kg. Le reste a été autoconsommé ou donné en cadeau
APDRA : Pourquoi à 500 francs le kg et non à 1000 francs par exemple
?
- Dotana et fils : Nous avons vendu à 500 francs le kg parce que les
Marc (Oswald) étaient passés ici une fois (ils étaient 2 Blancs ce jour-là)
et ils nous avaient dit que pour bien vendre, il faut commencer par un
prix assez bas, et si ça marche on peut augmenter. Aussi, il y a Nagnaniga
(NDRL : c’est un autre pisciculteur de Tagbayo) qui a eu beaucoup de problèmes
pour vendre ses poissons à 1000 francs le kg ; il s’est même déplacé jusqu’au
village d’Ottawa (à une dizaine de km de son lieu de résidence) pour tenter
la vente à 1000 francs le kilo, sans succès. En fin de compte, il a pu
vendre quelques kilo à 700 francs, mais avec beaucoup de perte de poissons.
C’est pour cela que nous nous sommes concertés avec les autres pisciculteurs
de Tagbayo pour fixer le prix de vente du kilo à 500 francs.
APDRA : Est-ce que toi et ton père, vous êtes satisfaits du résultat
de votre première vidange ?
Dotana et fils : Nous sommes satisfaits parce que tout travail
commence doucement ; Et nous savons que si nous continuons de bien travailler,
nous allons faire mieux.
APDRA : Avant votre vidange, espériez-vous gagner plus que ce que
vous avez eu, ou bien le contraire ?
Dotana et fils : En vérité, on s’attendait à un résultat plus
faible que ce qu’on a eu. Et comme ce premier résultat (qui nous satisfait
d’ailleurs) est seulement le fruit de nos connaissances de début, alors
nous savons maintenant que nous pouvons obtenir des résultats meilleurs
dans l’avenir.
APDRA : Qu’est-ce que vous espérez exactement quand vous dites que
si vous travaillez bien, vous pouvez faire mieux dans l’avenir ? Combien
espérez-vous gagner dans la pisciculture à l’avenir ?
Dotana et fils : Nous espérons dans l’avenir gagner au moins
le double de ce que nous avons gagné avec notre première vidange. Parce
que notre premier résultat de vidange nous a encouragés : Nous avons vendu
tous les 69 kilos sur place dans la même matinée sans sortir de notre
campement. Et donc, nous comptons faire un deuxième barrage cette année
qui sera plus gros que le premier. Cela peut donc nous aider à augmenter
nos résultats.
APDRA : Puisque vous étiez à votre début, avec qui avez-vous eu à
faire votre premier empoissonnement ?
Dotana et fils : C’était avec Djénéba.
APDRA : Comptez-vous toujours sur elle pour votre prochain empoissonnement,
ou bien vous pensez qu’avec vos connaissances actuelles, vous pouvez vous
en sortir tout seuls désormais ?
Dotana et fils : Nous comptions la solliciter pour notre prochain
empoissonnement, mais comme elle est absente et qu’on ne sait pas quand
est-ce qu’elle sera de retour, nous pensons qu’avec notre niveau de connaissance
actuelle en pisciculture, nous pouvons tenter seuls l’expérience avec
l’appui des autres camarades pisciculteurs.
APDRA : Pensez-vous avoir besoin d’elle aussi pour le suivi de vos
aménagements, ou bien vous êtes assez autonome à ce niveau-là ?
Dotana et fils : Son absence nous pénalise beaucoup, car nous
avons besoin de piquetage actuellement pour notre deuxième barrage. Mais
elle n’est pas là. Et même, Jérémie (NDRL : un autre pisciculteur de Tagbayo)
a vidé son barrage depuis janvier passé et continue d’attendre Djénéba
pour réempoissonner avec elle, parce que c’est elle qui a ses fiches d’empoissonnement.
D’ailleurs, elle a toutes les fiches d’empoissonnement de tous les pisciculteurs
avec lesquels elle a fait les empoissonnements l’année passée (en 99).
APDRA : A quand votre prochaine vidange ?
Dotana et fils : Nous n’avons pas encore empoissonné par manque
d’eau ; Mais si on empoissonne ce mois-ci (NDRL : Mars 2000), la vidange
sera pour Août prochain.
APDRA : Tout à l’heure, vous disiez que vous avez actuellement besoin
de piquetage et Djénéba n’est pas là ; Savez-vous que vous avez maintenant
2 aménagistes ici à votre disposition dans votre zone de Guéyo ?
Dotana et fils : Oui, on le sait. Mais nous n’avons pas encore
eu à travailler avec lui. Et puis, nous, on a eu à travailler tout le
temps avec Djénéba parce qu’étant avec nous ici à Tagbayo, elle nous revenait
moins chère au niveau de son déplacement et de sa prise en charge. Alors
que l’autre aménagiste est très éloigné de nous et va nous coûter cher
de le solliciter.
APDRA : Nous sommes maintenant à la fin de notre entretien. Avez-vous
un dernier mot à dire ?
Dotana et fils : Oui. Nous souhaitons que Djénéba revienne à
Guéyo maintenant, car nous avons beaucoup besoin d’elle ici. Pas seulement
mon père et moi, mais les autres pisciculteurs aussi.
Interview réalisée par Mama Coulibaly.
Nécrologie :
Vassiriki Koné, pisciculteur à Luénoufla a tiré sa révérence le 22 mars
2000 des suites d'une courte maladie. La rédaction de l'APDRA se joint
aux pisciculteurs sympathisants pour présenter ses condoléances à sa famille
et aux pisciculteurs de Luénoufla. Vassiriki laisse derrière lui un barrage
ouvert et un étang de service.
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